NOUS SOMMES TOUS GRECS !

vendredi 3 avril 2015
par  Jérôme Courtois

Un bel article du Monde Diplomatique sur la situation grecque qui fait écho à une rencontre avec Dimitri, grec d’Athènes, lors du dernier Conseil fédéral de sud éducation fin mars.

Dr Folamour à Athènes
par Pierre Rimbert, avril 2015

Peu après la rencontre des chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro consacrée à la situation financière en Grèce, le 20 mars, la chancelière allemande Angela Merkel définissait la marge de manœuvre dont disposait le premier ministre Alexis Tsipras par rapport au programme présenté en décembre dernier par son prédécesseur de droite : « Le gouvernement grec a la possibilité de choisir différentes réformes en suspens depuis le 10 décembre et de les remplacer par d’autres dès lors qu’elles ont le même effet (1). » Mais quel « effet », justement ?

Du taux de suicides ascensionnel (+ 35 % après les mesures d’austérité de juin 2011 (2)) aux malades mourant faute de médicaments, les résultats du traitement infligé par les eurocrates au peuple grec évoquent une expérimentation de dislocation sociale menée à grande échelle. Ce tableau crépusculaire s’est enrichi de nouveaux détails grâce à une étude publiée le 19 mars par la Fondation Hans-Böckler, proche de la Confédération allemande des syndicats. Conduite par deux professeurs d’économie, elle dresse le bilan de cinq années d’austérité sur les revenus d’un échantillon de deux cent soixante mille ménages grecs (3).

Ici, les drames de la faim, du froid et du chômage se réverbèrent sur la matière froide des statistiques. Entre 2008 et 2012, les revenus avant impôt des Grecs baissent de 22,6 % ; les seuls salaires sont scalpés de 27,4 %. Mais ce régime ne s’applique pas uniformément : les 10 % des salaires les plus faibles plongent de 34,6 %, tandis que les 1 % les plus hauts ne dérapent que de 4,8 %. Et quand, au lieu de scruter des moyennes, les auteurs suivent les trajectoires de foyers réels, les écarts s’accroissent encore. Ainsi, les 10 % des ménages les plus pauvres de 2012 ont perdu en cinq ans 86,4 % de leurs revenus, alors que les 10 % les plus riches ont essuyé une décote de 17 %.

On objectera que les bonnes fées penchées sur le brancard grec n’ont jamais prétendu ressusciter l’égalitaire Sparte. « La baisse des salaires est devenue pour la troïka un outil stratégique pour restaurer la compétitivité », rappellent les auteurs. Sur ce plan, l’échec est si cuisant qu’il relève presque du cas d’école : en 2014, malgré le coup de tranchoir salarial, « les exportations étaient inférieures de 11,9 % à celles de l’année précédant la crise ».

Pour atteindre l’équilibre budgétaire — et même un surplus — dicté par les créanciers, les coupes dans les dépenses publiques se sont accompagnées d’une hausse massive d’impôts. Dans ce domaine aussi, l’iniquité a prévalu. Entre 2008 et 2012, « le fardeau fiscal a crû de 337,7 % sur les faibles revenus et de 9 % sur les déciles supérieurs ». Et encore, précisent les auteurs, pauvres et riches présents dans l’échantillon ont payé pour le troupeau des évadés fiscaux.

A Bruxelles, Paris, Berlin, un tel bilan chasse toute hésitation : en avant, continuons !

Pierre Rimbert
Soutenez-nous !
A quoi sert « Le Monde diplomatique » ? A apprendre et à comprendre. A donner un peu de cohérence au fracas du monde là où d’autres empilent des informations.
Faites un donAbonnez-vous
(1) Cité par le Financial Times, Londres, 21-22 mars 2015.

(2) Charles C. Branas (sous la dir. de), « The impact of economic austerity and prosperity events on suicide in Greece : A 30-year interrupted time-series analysis », BMJ Open, vol. 5, no1, 2 février 2015.

(3) Tassos Giannitsis et Stavros Zografakis, « Greece : Solidarity and adjustment in times of crisis », IMK Studies, n° 38, Düsseldorf, mars 2015.


Agenda

<<

2024

 

<<

Avril

 

Aujourd’hui

LuMaMeJeVeSaDi
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
2930     
Aucun évènement à venir d’ici la fin du mois

Annonces

Réforme collège


Rythmes scolaires